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6 avril 2017

Face au changement climatique, construire la résilience urbaine en Afrique

A l'occasion du lancement de la chaire du Professeur Mark New sur la réduction des risques climatiques à l'Université de Cape Town, retour sur une problématique mondiale : la résilience des villes face au changement climatique.

En novembre 2016, la COP 22 de Marrakech nous rappelait la vulnérabilité de l’Afrique face aux changements climatiques. Alors que le continent ne produit que 4% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, la sécurité alimentaire et l’accès à l’eau potable de millions d’Africains sont aujourd’hui menacés, notamment dans les villes dont les infrastructures sont déjà mises à l’épreuve par l’arrivée d’importantes populations quittant les espaces ruraux.

Face à ces défis, croisant l’urbanisation et les différents facteurs de stress environnemental comme le changement climatique, une mise en commun des savoirs et des expertises devient nécessaire pour accompagner les villes africaines dans leurs stratégies de résilience.

« Notre planète ne peut pas se permettre une demi-révolution urbaine ».

« Si nous voulons élever le profil des villes du XXIe siècle, aucun territoire ne doit être laissé de côté », avance d’emblée Debra Roberts, directrice des initiatives pour la ville durable et résiliente au sein de la Municipalité d’eThekwini, la collectivité territoriale en charge de la planification urbaine et de la gestion de la ville de Durban en Afrique du Sud. En 2015, Debra Roberts a rejoint le comité scientifique du Fonds AXA pour la Recherche qui a sélectionné la première « Chaire AXA sur le risque climatique en Afrique », ouverte à l’université de Cape Town et dont Mark New, professeur récemment arrivé dans cette Université, est le premier titulaire.

En Afrique du Sud, les effets de la variabilité climatique sont ressentis depuis des décennies par les populations, du fait de ses impacts sur la biodiversité, les réserves en eau, la production agricole – souvent via des événements météorologiques extrêmes comme les inondations, les sécheresses, et les vagues de chaleur. « Ces périls ont toujours existé, mais le réchauffement climatique a modifié – et continuera de modifier - leur fréquence et leur intensité. L’impact du changement climatique sur ces perturbations, et leurs effets sur le continent, ont été peu étudiés jusqu’à aujourd’hui », précise Mark New. « L’objectif de la Chaire AXA, ajoute-t-il, est de combler ces brèches de savoirs en finançant un nouveau programme de recherche sur les risques climatiques en Afrique tous les cinq ans ».

Développer les savoirs climatiques en Afrique

Le Professeur Mark New aura ainsi pour mission d’analyser l’impact des activités humaines sur ces dérèglements climatiques, et de quantifier l’évolution des risques qui leurs sont liés. Son équipe de recherche étudiera également sur le terrain l’influence de l’activité humaine, en comparant les méthodes de gestion des terres et leurs conséquences sur la sensibilité de l’approvisionnement alimentaire et en eau aux événements climatiques extrêmes. A terme, la chaire entend réunir les cerveaux les plus brillants du continent à travers un programme de recherches multidisciplinaires qui convoquent l’expertise climatique, les sciences statistiques, l’hydrologie, les sciences agricoles et l’économie. L’objectif étant de former une nouvelle génération de chercheurs sur la compréhension des dérèglements climatiques qui hypothèquent le développement des pays africains – de nombreuses chaînes d’approvisionnement en nourriture et en eau considérées comme « à risque » sont en effet celles qui desservent les villes.

« Le Fonds AXA pour la Recherche constitue un élément essentiel dans notre coopération avec le monde scientifique », indique Philippe Derieux, Directeur des nouveaux business models d’AXA P&C (branche d’AXA qui regroupe les assurances de dommages aux biens et de responsabilité civile et professionnelle), dont les équipes créent des modèles de simulation et des outils d'ana-lyse des risques climatiques. « Le Fonds nous permet aujourd’hui de développer ces savoirs dans nos domaines de prospectives et de les partager avec la société de façon plus globale ». Depuis son lancement, le Fonds AXA a déjà permis de soutenir 492 projets de recherche fondamentale. Pour être conseillé dans l’attribution de ses financements, le Fonds s'est entouré d'un comité scientifique international composé de chercheurs en sciences de la Terre mais aussi en sciences humaines, en médecine, en sciences du développement, ainsi que des praticiens de l’environnement comme Debra Roberts qui apportent leur expérience empirique. « Ces personna-lités viennent élargir notre compréhension du monde, ils nous aident à nourrir le débat public, et à mieux orienter nos actions », reprend Philippe Derieux.

Augmenter la résilience des communautés les plus vulnérables

Aujourd’hui, l’Afrique compte quarante-sept villes de plus d’un million d’habitants. D’ici 2030, les experts prévoient que la moitié de la population africaine vivra dans ces villes, qui concentrent déjà l’essentiel de l’activité économique. « Evaluer l’impact de l’instabilité climatique sur les infrastructures qui vont accueillir ces populations est un enjeu fondamental pour les accompagner dans leurs stratégies de résilience, et protéger leur développement », explique Philippe Derieux. « A l’heure où nous nous engageons pour la résilience des villes, nous ne concevons pas notre mission sans un engagement auprès des pays émergents ». Les experts du climat chez AXA Global P&C sont connectés en permanence avec le monde de la recherche pour approfondir et partager leurs connaissances. Pour Philippe Derieux, cette collaboration entre le monde industriel et celui de la recherche est essentielle pour établir des outils innovants de modélisation et d’analyse des risques. « Mieux nous comprenons les risques, et mieux nous pouvons protéger ceux qui y sont exposés », ajoute-t-il. « Certaines villes africaines connaissent des difficultés économiques, mais ce sont aussi des espaces extraordinairement dynamiques où de nouveaux partenariats peuvent être expérimentés entre le secteur privé et les gouvernements locaux. »

Debra Roberts

Directrice de l'Unité Initiatives pour la ville durable et résiliente de la municipalité d'eThekwini, Afrique du Sud

Pour relever le défi climatique, il faudra que tous les acteurs engagés s'accordent collectivement sur la valeur des ressources naturelles dans nos économies, et les reconnaissent comme des biens à protéger.

AXA participe ainsi à un programme d’assurance paramétrique couvrant plusieurs pays africains, destiné à assurer la pérennité économique des exploitants agricoles en cas de mauvaises récoltes. Ce nouveau modèle d’assurance, fondé sur les données météorologiques ou de rendement, permet de verser automatiquement une indemnité aux assurés dès qu’intervient un événement affectant les récoltes. En protégeant la production agricole, ces produits d’assurance innovants contribuent également à renforcer la sécurité alimentaire des villes face au changement climatique.

Valoriser les savoirs traditionnels

Si la recherche scientifique apporte des outils d’analyse et de modélisation pour anticiper les périls, Debra Roberts rappelle également la nécessité « d’écouter les savoirs traditionnels hérités des populations locales pour comprendre le fonctionnement profond de nos écosystèmes et des communautés locales ». A Durban, une part importante du territoire est gérée par des communautés traditionnelles Zulu qui vivent en contact permanent avec la nature et sont les premiers témoins du dérèglement des cycles saisonniers. « Un axe majeur de notre travail doit maintenant se consacrer à la conservation de ces savoirs traditionnels, et aux moyens de les intégrer aux stratégies de résilience que nous mettons en place », assure Debra Roberts. Or beaucoup de ces communautés vivent déjà dans une très grande fragilité économique. Pour Debra, réduire l’impact des changements climatiques sur les populations commence ainsi par améliorer les conditions de vie des plus démunis. « Nous avons longtemps pensé que la responsabilité de la planification et de la gestion urbaine revenait aux gouvernements, explique Debra Roberts. Mais nous savons aujourd’hui qu’il faut réunir tous les acteurs autour de ce challenge : les gouvernements locaux, la société civile, et les acteurs du secteur privé. Nous devons trouver de nouvelles formes de gouvernances urbaines qui invitent chacun à la table des décisions ».

Activer la coopération publique et privée

Parmi ces initiatives hybrides, Debra Roberts évoque le programme de reforestation mis en place par la Municipalité de eThekwini et le Wildlands Conservation Trust. En échange des arbres indigènes qu’ils cultivent, les planteurs reçoivent des notes de crédits avec lesquelles ils peuvent acheter des biens et des services de la vie quotidienne dans des « Tree Stores » : nourriture, vêtements, tickets de cantine, leçons de conduite, matériaux de construction pour les maisons. « L’amélioration de l’habitat est fondamentale pour développer la résilience des populations », poursuit Debra Roberts. « Avec ce programme, nous créons une économie basée sur une nouvelle chaîne de valeurs qui développe les ressources naturelles de la ville, tout en initiant des formes de coopération entre les gouvernements locaux, les ONG et les entreprises. »

Philippe Derieux

AXA GLOBAL RE

La collaboration entre le secteur privé, les chercheurs et les gouvernements locaux est aujourd'hui essentielle pour accompagner les villes africaines dans leurs stratégies de résilience.

Les équipes de Debra travaillent aussi sur des enjeux de gouvernance des terres entre la Municipalité et les grands propriétaires terriens. « Nous travaillons sur un projet pilote avec trois entreprises pour créer un modèle qui leur permette d’optimiser les compensations en matière de biodiversité requises pour ‘mitiger’ (voir définition) l’impact du développement de leurs activités. L’objectif est de garantir la création, la protection et la bonne gestion de trois réserves naturelles ‘hors-site’, qui permettront de créer des emplois pour les communautés locales. « Avec cette initiative, nous voulons transformer le modèle de développement classique en un outil de développement durable et de résilience, explique Debra qui a beaucoup d’autres idées pour orienter les investissements sociaux des grands groupes dans des activités de développement durable. Selon Debra, il s’agit maintenant pour les assureurs de relever un défi fondamental : « comment assurer le bassin-versant d’un cours d’eau, une zone humide, une forêt ? » Mais auparavant, Debra estime qu’il faudra « tous les acteurs engagés s’accordent collectivement sur la valeur de ces ressources naturelles dans nos économies, et les reconnaissent comme des biens à protéger ».

Forte de trois décennies d’expérience sur le terrain au sein de gouvernements locaux, Debra Roberts garde toute sa modestie face aux aléas du climat et de la politique. « Une chose est certaine » nous assure-t-elle, « nous ne pourrons pas appliquer les mêmes stratégies partout. Mais si nous commençons à considérer les espaces naturels comme des éléments essentiels de l’infrastructure des villes, et si nous créons des emplois liés à ces infrastructures écologiques, nous aurons les premières clefs pour développer la résilience des villes de demain ».

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