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Sarah PressmanPRIX AXA (UNIVERSITÉ DE CALIFORNIE A IRVINE, ÉTATS-UNIS)

29 mai 2020

Covid-19 : Comment vivre avec l’incertitude ?

La récente épidémie est une source de peur et d'anxiété pour tout le monde, en raison du risque de contracter le virus, mais aussi des conséquences sociales et économiques du confinement mondial sans précédent.

Les facteurs de stress sont particulièrement dangereux lorsqu’ils sont incertains

Tout le monde reconnaît que cette période est très stressante. Selon le Dr. Pressman, qui enseigne la Psychologie à l'Université de Californie à Irvine, l'une des caractéristiques les plus marquantes des facteurs de stress - les choses qui provoquent un état de tension - est qu'« ils sont particulièrement dangereux pour nous s'ils sont incertains. À l'heure actuelle, nous ne savons pas si nous allons tomber malades, si nous aurons des symptômes mineurs ou si nous serons à l'hôpital en train de lutter pour notre vie. Nous ne savons pas si nous allons perdre notre emploi, ou si nos besoins fondamentaux seront satisfaits. »

Outre l'incertitude, la situation actuelle est un « facteur de stress incontrôlable. » Comme l'explique le Dr. Pressman, « que nous soyons coincés ou non à la maison ne dépend pas de nous. Nous ne pouvons rien faire personnellement pour éliminer ce facteur de stress. C'est pourquoi vous voyez les gens se comporter de manière étrange, comme par exemple acheter tout le papier toilette dans les magasins. Ils essaient de prendre le contrôle de quelque chose. »

Un autre facteur aggravant est la durée. Le stress n'est pas particulièrement néfaste à court terme, car notre corps est construit pour gérer des situations d’évitement ou de combat de courte durée. Mais, comme le souligne le Dr. Pressman, « lorsque le stress persiste pendant une période prolongée, comme c'est actuellement le cas, notre corps commence à se dérègler. » Il ne passe pas en homéostasie - équilibre stable entre les processus physiologiques - et, selon le Dr. Pressman, « c'est à ce moment que vous commencez à voir les dommages psychologiques, comportementaux et physiologiques se produire. »

Ces dommages sont causés par des comportements d'adaptation malsains : « On mange trop, on fume, on boit beaucoup. Et de plus, pour ne rien arranger, nous ne pouvons pas adopter de bonnes habitudes pour faire face à la situation. » Les bonnes habitudes d'adaptation consistent notamment à aller faire du sport et fréquenter des amis. Convaincre les gens que fumer et boire peuvent être nocifs n'est pas difficile mais, comme le fait remarquer le Dr. Pressman, « peu de gens connaissent les méfaits de ne pas prendre de vacances, par exemple, qui peut littéralement vous tuer. » Combiné à de mauvaises habitudes de santé, le manque d'accès à nos bonnes stratégies habituelles d'adaptation peut nous conduire sur la voie de la dépression clinique. De nombreux professionnels de la santé mentale craignent que les comportements suicidaires n'augmentent.

La pandémie érode également nos relations sociales, et pas seulement en dehors de la maison : « parce que nous sommes confinés ensemble tout le temps, nos foyers peuvent aussi devenir une source de stress. Nous savons que, dans certains cas, ces situations peuvent déboucher sur la violence. »

Se concentrer sur les éléments positifs

Le Dr. Pressman conseille de se concentrer sur les éléments qui sont sous notre contrôle. En se concentrant sur ces éléments, la meilleure intervention, dit-elle, « est d'essayer de libérer l'énergie que notre corps économise, de libérer l'adrénaline qui circule dans notre corps, » comme une façon de s'adapter à l'anxiété que la situation crée, qu'elle décrit comme « le sentiment constant qu'un lion est sur le point de nous attaquer. » Elle recommande de faire de l'exercice : « Trouvez un entraînement de haute intensité en ligne ou allez courir si cela est possible. »

Le fait de ne pas pouvoir se promener ou laisser les enfants dehors crée un autre problème de santé mentale. « La nature et l'exercice sont d'énormes prédicteurs de bien-être. Le simple fait d'être près des arbres peut réduire votre tension artérielle. » Heureusement, il existe des solutions pour combler ce déficit : « De simples exercices de respiration aident. La respiration rythmée peut activer la composante de relaxation de notre système nerveux et faire baisser mécaniquement le rythme cardiaque et la pression sanguine. »

Pour compenser le manque de socialisation avec nos amis, « capitaliser sur les relations que nous avons, comme aller vers les gens en ligne, peut aider. » Le Dr. Pressman recommande de nous concentrer sur les éléments positifs qui sont disponibles maintenant et sur les choses que nous pouvons planifier. Elle recommande également d'utiliser les ressources en ligne sur le bien-être psychologique. Du point de vue de la santé publique, elle recommande de commencer à imaginer des « bulles d'isolement » un peu plus grandes, où les gens peuvent se mettre en quarantaine ensemble, en groupes de deux ou trois familles, et partager les tâches de garde d'enfants.

Comprendre la santé du corps et de l’esprit dans son ensemble

Tout ce que nous ressentons ou pensons est susceptible de modifier notre physiologie. Des décennies de recherche ont montré que l'humeur, le stress et les relations peuvent affecter nos hormones du stress, nos systèmes immunitaire et cardiovasculaire et notre capacité à nous remettre ou non d’une maladie. « Nous savons également que des facteurs de protection, comme les relations sociales et les émotions positives, peuvent défaire ces processus de stress et nous protéger afin que nous ne tombions pas malades. Nous comprenons très bien ces mécanismes. »

Cette relation corps-esprit a également des implications sur l’impact du Covid-19, que l'on peut prévoir en examinant les facteurs psychosociaux et comportementaux. « L'énorme variabilité que nous constatons dans la façon dont les gens tombent malades, au-delà des conditions préexistantes ou de l'âge, pourrait s'expliquer en partie par les prédicteurs psychosociaux. » Les comportements que nous adoptons à la maison - comment nous agissons dans nos relations, nos pensées, notre niveau de stress - influencent sans aucun doute le fait que nous contractons ou non le virus et la façon dont nous tombons malades. « Si nous parvenons à comprendre cela, nous pourrons adapter les interventions psychosociales en conséquence. »

Marie Bogataj

Directeur du Fonds AXA pour la Recherche et de la Prospective Groupe

En réponse à la crise sanitaire mondiale sans précédent, le Fonds AXA pour la Recherche a réuni sa Task Force Covid-19 avec des scientifiques de haut niveau, à l'occasion d'un webinaire d'Experts. L'objectif est de fournir des informations qui éclaireront la prise de décision et offriront des pistes viables pour atténuer les effets de la crise, tout en préparant au mieux la prochaine crise potentielle.

En savoir plus sur le Dr. Pressman.

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